mercredi 11 mai 2016

Chiens de sang de Karine Giebel

C'est à l'occasion d'une lecture commune avec une blogueuse récemment découverte mais que j'aime beaucoup, Anne Sophie, du blog "Mes lectures... page après page" que j'ai ouvert ce petit roman de moins de trois cents pages. L'expérience fut très enrichissante, et je compte bien la reproduire.


Résumé

Courir ; toujours plus vite. Plus loin. Fuir la mort qui plane au-dessus d'eux; oiseau de proie aux ailes gigantesques dont l'ombre les dévore déjà. Diane a choisi la fuite. D'instinct. Elle sait qu'ils sont derrière. Juste derrière. Avance minime, infime. Comme son espérance de vie, désormais. Pourtant, elle marche. Pourtant, elle veut vivre. Rémy avance. Avec le poids de la peur qui comprime son cœur. Le poids de la fatigue, comme un boulet enchaîné à ses jambes. Il devrait être ailleurs, en ce moment même. En compagnie de sa femme et de sa fille. Mais non, il est là, errant dans ces bois inhospitaliers, avec ces inconnus qui fuient comme lui. Il est devenu une proie. Rien qu'une proie. Il n'existe plus. Déjà mort. Alors, pourquoi a-t-il aussi peur ? Le monde est ainsi fait, qui ne changera jamais. Les chasseurs d'un côté, les proies de l'autre.

Mon résumé - si vous ne craigniez pas d'en savoir trop...


Deux actions: 
-Rémy, sans-abri parisien, tente d'aider un homme qui se fait agresser. Celui-ci, pour le remercier, lui offre d'abord un repas, avec, plus que de la nourriture chaude, une conversation agréable et une considération sincère, puis une chance, celle qu'il attendait sans plus oser l'espérer: un emploi, un lieu de vie. Il embarque donc pour sa nouvelle vie, mais très vite se rendra compte que l'espoir en la nature humaine a un prix. Il se retrouve prisonnier, au côté de sans papiers: Sarhaan, un malien, et deux frères tchétchènes, Eyaz et Hamzat, qui avaient espéré trouver en France le pays des droits de l'homme. Ils comprennent très vite, admettent plus lentement, que des milliardaires en mal de sensations fortes vont s'offrir la chasse de leur vie. Eux seront les proies...
-Et puis il y a Diane, une photographe, au caractère solitaire, qui ne se remet pas d'une rupture trop soudaine. Elle quitte Paris pour un séjour photo en pleine nature, dans les Cévennes. A son arrivée dans le village, elle fait la connaissance, dans l'auberge où elle réside, de l'aubergiste Hughes et de trois de ses amis: Roland Margon, le pharmacien, Séverin Granet et son fils Gilles, qui possèdent une exploitation agricole. Si leurs chemins se sont à peine croisés la veille, Diane devra les fuir pendant de longues heures le lendemain, car elle a été témoin d'une scène qu'elle aurait mieux fait d'ignorer... 

Ces deux histoires se déroulent dans une région meurtrie, puisque une jeune fille, Sylvie, a disparu quelques jours avant le début de l'histoire. L'ermite du village, Sylvain, a-t-il quelque chose à voir avec cette disparition? Les destins de Rémy et Diane vont-ils se croiser? ou peut-être seulement leurs routes? Qui se sortira vivant de cette traque infernale... 

Mon avis


Dès l'ouverture du livre, on entre dans l'histoire de plein fouet. Les histoires en fait, puisqu'il y en a deux: celle de Rémy, SDF parisien, et celle de Diane, photographe. Le décor est le même, les montagnes cévenoles. Et les drames qui s'y jouent sont mis en parallèle, sur bien des points. En effet, la cruauté, qu'elle soit le fait d'hommes ordinaires ou de richissimes chasseurs, a le même arrière-goût métallique...

Pendant tout le roman, on oscille entre les deux histoires, chaque chapitre relatant à la fois l'épopée de Diane, isolée, et celle de Rémy, qui lui n'est pas seul. Le style est particulier, et participe à la cadence infernale: on y trouve des paragraphes nombreux, le plus souvent des phrases courtes. Énormément de verbes , qui décrivent une action qui se déroule à cent à l'heure. A certains passages, notamment lors de l'évocation du passé de certains protagonistes, l'auteur fait comme des pauses: là, le style change: beaucoup d'énumérations, que ce soit d'adjectifs, de verbes ou de noms. Le plus souvent, une succession de synonymes, parfois des termes en escalade. J'ai apprécié que le rythme des mots colle à celui de l'action. 

Au niveau de l'intrigue, elle évolue par à-coups, et on oscille entre l'histoire qui a lieu au moment même et celles des personnages, qui éclairent le lecteur sur leurs passés, mais pas innocemment. Le plus souvent, le morceau de passé choisi est celui qui a marqué leur vie, celui où tout a déraillé, peut-être même celui, indirectement, qui les a menés à ces situations inextricables. 

A la lecture de ce thriller, j'ai ressenti plusieurs choses: un sentiment d'enfermement, assez ironique puisque tout se déroule en pleine nature... Je ne savais pas comment les protagonistes pourraient s'en sortir, ni même s'ils s'en sortiraient. Cette fuite en avant était oppressante et enivrante à la fois. Du dégoût aussi, pour cette nature humaine abjecte ici évoquée. Certains passages m'ont révoltée "De vastes zones à vampiriser, des espèces entières à exterminer". Pourquoi certains être humains ont-ils un tel besoin de destruction? A un moment, via le personnage du Lord, l'auteur nous invite à nous interroger: si de tels crimes pouvaient être commis en toute impunité, sans le poids du regard d'autrui, combien franchiraient le pas? Je me suis aussi posé beaucoup de questions sur l'identité du meurtrier de Sylvie. Tous y passent, au fil des chapitres, et pourtant... là on en vient à ce qui m'a moins plu, la fin. D'abord la réponse à cette interrogation: comme si l'auteure voulait que nous ne trouvions pas, elle finit par une pirouette, et cela m'ennuie car je suis d'accord pour être surprise, je préfère même, mais pas au prix d'une incohérence... Non pas que ce soit impossible, mais improbable. Ensuite, le devenir des personnages. Au moment où tout semble enfin terminé, où les vivants peuvent enfin s'arrêter de courir, leur fuite reprend, et de celle-ci nous ne connaîtrons jamais le dénouement.

En conclusion, ce thriller a été très agréable à lire, j'ai pris beaucoup de plaisir, notamment grâce au style, mais la fin m'a un peu déçue. Quant à la lecture commune, elle m'a permis de m'interroger en permanence, sur le devenir des personnages, les projets de l'auteur. Cela m'a aussi obligée à faire des pauses, tous les cinq chapitres, et si je ne pourrais pas lire tout le temps de la sorte, une fois de temps à autre j'en serai ravie. 


Et vous, faites-vous des LC? Comment procédez-vous?



Je vous invite à lire la chronique de mon binôme ici



4 commentaires:

  1. J'ai adoré faire cette LC avec toi. J'espère que c'est la premère d'une loooooooooongue série. Je te fais des bisous ma belle !

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    1. Pareil pour moi. C'était vraiment chouette ;) et oui ce ne sera pas la dernière ! Gros bisous

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  2. C'est le seul que j'ai lu de Karine Giebel et j'ai apprécié de ne pas avoir trop peur. Original et marquant. Une bonne lecture

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    1. Je te conseille son recueil de deux nouvelles "maître du jeu". J'ai adoré. Merci pour ton commentaire :)

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Merci pour vos petits mots ;)